Et si les stablecoins étaient un gigantesque cheval de Troie pour financer la dette américaine ?
En quelques mois, les États-Unis ont déroulé un long tapis rouge pour les stablecoins. Le GENIUS Act, plébiscité par beaucoup, vise justement à les encadrer et devrait arriver très prochainement. Mais s'agit-il réellement que de bonnes intentions ? Ou bien, se pourrait-il que, finalement, tout cela soit organisé pour sauver la dette et favoriser les plus grandes banques ?

Les stablecoins explosent. Mais pourquoi ?
Depuis le début de l'année 2021, les stablecoins connaissent une croissance importante, et sont peu à peu devenus un incontournable du marché crypto. Ces cryptomonnaies uniques en leur genre sont adossées à un actif, très souvent une devise comme le dollar ou l'euro.
Presque toujours le dollar, d'ailleurs : à l'heure de l'écriture de ces lignes, les stablecoins ont une capitalisation boursière de 264 milliards de dollars. Sur ce montant, 256,5 milliards sont des stablecoins adossés au dollar, avec les géants Tether et Circle qui mènent la barre.
Le premier, historique leader du secteur, affiche une capitalisation boursière de 158 milliards de dollars avec son USDT. Circle, éternel second, a une capitalisation de 62 milliards de dollars avec l'USDC.
🥇 Découvrez les meilleurs stablecoins pour générer un rendement passif
Depuis peu, les stablecoins sont encensés aux États-Unis, que ce soit par les banques ou les entreprises. La raison à cela est l'assouplissement réglementaire qui se dessine depuis que Donald Trump est président du pays, notamment à travers le GENIUS Act récemment adopté par le Sénat.
Même Scott Bessent, le secrétaire au Trésor des États-Unis, semble également s'extasier à l'idée que les stablecoins arrivent en force :
Recent reporting projects that stablecoins could grow into a $3.7 trillion market by the end of the decade. That scenario becomes more likely with passage of the GENIUS Act.
A thriving stablecoin ecosystem will drive demand from the private sector for US Treasuries, which back…
— Treasury Secretary Scott Bessent (@SecScottBessent) June 17, 2025
« Des rapports récents prévoient que les stablecoins pourraient atteindre un marché de 3 700 milliards de dollars d'ici la fin de la décennie. Ce scénario devient plus probable avec l'adoption du GENIUS Act. »
Mais, surtout, Scott Bessent souligne une chose : « un écosystème de stablecoins florissant stimulera la demande du secteur privé pour les bons du Trésor américain, qui les soutiennent. Cette nouvelle demande pourrait réduire les coûts d'emprunt des États et contribuer à maîtriser la dette nationale. »
Un début de réponse à la question que pose Arthur Hayes, le cofondateur de BitMEX, dans son dernier billet de blog :
![]()
Pourquoi Scott Bessent est-il aussi bullish sur les stablecoins ? Pourquoi le « Genius Act » a-t-il reçu un soutien bipartisan ? Est-ce que les politiciens américains se soucient vraiment de la liberté financière, ou y a-t-il autre chose derrière ? Peut-être qu'ils s'en soucient dans l'abstrait, mais les nobles idéaux ne motivent pas l'action.
« Il doit y avoir une autre raison, plus réaliste, à ce revirement sur les stablecoins », ajoute-t-il.
Recevez 20 $ en Bitcoin avec le code CRYPTOAST20 sur GeminiLa dette américaine en toile de fond
Pour étayer ses propos, Arthur Hayes a effectué quelques rappels. Face aux dépenses incontrôlées, les États-Unis se retrouvent dans la situation suivante :
- Les dépenses publiques explosent (sécurité notamment, avec l'implication des États-Unis en Ukraine et au Moyen-Orient) ;
- Les impôts ne suivent pas le mouvement ;
- Le seul recours est la dette.
Cela n'est pas la spécificité des États-Unis, comme le prouve le graphique suivant. Cependant, leurs rendements sur les obligations à 30 ans sont parmi les plus élevés, traduisant une perte de confiance des emprunteurs envers la capacité de remboursement de l'État.
Rendements des obligations à 30 ans pour le Royaume-Uni (blanc), les États-Unis (vert), la France (rouge), l'Allemagne (violet) et le Japon (jaune)
De surcroît, depuis 2022, fini le quantitative easing : la Fed ne peut plus acheter massivement de bons du Trésor comme elle le faisait post-2008 tout en maintenant les taux d'intérêt très bas.
🥇 Découvrez les meilleures plateformes pour acheter de la crypto
Enfin, selon Arthur Hayes, le puits à liquidité du Reverse Repo Program (RRP), qui vise à permettre aux institutions financières de déposer temporairement leur argent à la Fed contre des bons du Trésor ou des MBS (Mortgage-Backed Securities), avec un petit rendement, est bientôt asséché.
Ce mécanisme, qui a pris le relai sur une période de quantitative easing non dissimulée, permettait de préserver la stabilité du système monétaire américain.
Cette « botte secrète » n'étant plus à disposition, quelle solution pour sauver les marchés ?
Trade Republic : acheter des cryptos et des actions en 5 minutesLes stablecoins : des milliers de milliards pour les bons du Trésor
C'est là que les stablecoins interviennent. « Les banques "Too Big to Fail" ont des réserves importantes (dépôts, réserves à la Fed). Elles pourraient injecter jusqu'à 6 800 milliards de dollars dans les T-bills si on leur permet d'émettre des stablecoins » affirme Arthur Hayes.
Alors que les banques ont été encouragées à accumuler massivement des bons du Trésor à long terme de 2020 à 2022, la subite hausse des taux d'intérêt a conduit à la faillite de certaines d'entre elles. Celles encore debout sont donc naturellement moins enclines à s'exposer à la dette américaine.
📍 Comment les émetteurs de stablecoins s'adaptent-ils aux changements de taux directeurs de la Fed ?
Évolution des taux d'intérêt des fonds fédéraux des États-Unis
Ce qu'elles recherchent à présent, ce sont des actifs plus liquides, moins risqués et générateurs de rendement. Les T-bills à courte échéance remplissent ces critères. Mais surtout, les stablecoins offrent un canal parfaitement adapté pour en détenir tout en répondant à une logique de rentabilité opérationnelle.
D'ailleurs, JPMorgan, la plus grande banque des États-Unis, l'a bien compris : elle vient d'officialiser le lancement du JPMD, un deposit token qui sera proposé sur le layer 2 Base et - pour le moment - réservé aux institutionnels.
Comme le rappelle Arthur Hayes, l'assouplissement du Supplemental Leverage Ratio (SLR), qui doit arriver dans les 6 mois, permettra de diminuer la quantité de capital à immobiliser par les banques face à leurs avoirs en T-bills. Une mesure qui devrait libérer jusqu'à 5 500 milliards de dollars de liquidités dans les bilans bancaires.
Des liquidités qui permettront aux grandes banques d'acheter massivement des bons du Trésor à court terme tout en émettant de plus en plus de stablecoins, qui devraient à terme cannibaliser les dépôts classiques.
C'est là une opération gagnant-gagnant : les banques rachètent de la dette américaine tout en réduisant leurs coûts de conformité massifs, par exemple en automatisant les analyses de transactions on-chain avec l'IA. C'est ainsi qu'un stablecoin émis par une banque devient un acheteur indirect de dette publique.
Ledger : la meilleure solution pour protéger vos cryptomonnaies 🔒Une mécanique bien huilée, pensée pour maintenir l'hégémonie des banques
De surcroît, certaines mesures du GENIUS Act ne sont pas anodines. Elles garantissent l'oligopole des plus grandes banques américaines, qui travaillent main dans la main avec l'État, notamment en interdisant aux Big Tech d'émettre leur propre stablecoin, qui seront dans l'obligation de travailler avec… une banque.
Enfin, comme le note Arthur Hayes, les FinTechs comme Circle et les petites banques ne bénéficient pas d'une garantie gouvernementale sur leurs engagements, contrairement aux grosses banques. « Si ma mère devait un jour utiliser un stablecoin, ce serait un émis par une banque TBTF. Les boomers comme elle n'utiliseront jamais une FinTech ou une petite banque à cette fin, car ils ne leur font pas confiance en raison de l'absence de garantie étatique », affirme-t-il.
🏦 Découvrez les 7 banques les plus crypto-friendly en France
En somme, les stablecoins permettraient aux banques :
- De ne pas perdre les dépôts qui pourraient aller chez les concurrents (FinTech, etc.) ;
- De réduire les coûts en conformité ;
- De ne pas verser d'intérêts ;
- De gagner des rendements via les T-bills à court terme ;
- De faire grimper leur cours en bourse.
« Le cheval de Troie des stablecoins est déjà à l'intérieur de la forteresse, et lorsqu'il s'ouvrira, il ne sera pas armé de rêves libertaires - il sera chargé de liquidités pour l'achat de bons du Trésor visant à maintenir les actions gonflées, les déficits financés et les baby-boomers endormis », conclut-il.
Long ou short plus de 100 cryptos avec Hyperliquid
Sources : Arthur Hayes, TRADING ECONOMICS
Recevez un récapitulatif de l'actualité crypto chaque jour par mail 👌
Certains contenus ou liens dans cet article peuvent être de la publicité. Cryptoast a étudié les produits ou services présentés, mais ne saurait être tenu responsable de tout dommage ou perte liés à leur usage. Investir dans les cryptomonnaies comporte des risques. N'investissez que ce que vous êtes prêt à perdre.
Franchement, super article et super bien écrit